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« Meurtri, mais content » : la boxe et son apprentissage au XIXe siècle

« La boxe a été définie “le plus court chemin d’un poing à un autre” », lit-on dans La Boxe anglaise et française, manuel du professeur Julien Leclerc publié en 1911.

Dans A la porte du paradis, recueil de récits divers, le célèbre bohème Alfred Delvau narre ainsi sa première leçon de boxe en Angleterre : « De grands diables de murs nus, ornés çà et là de gants de boxe en buffle. Par terre, une couche épaisse de sciure de bois pour amortir les chutes. A peine éclairée, froide, presque sinistre. »

Delvau fait ressentir par l’écriture l’effort et la dureté de l’entraînement : « Je compris bientôt pourquoi il n'y avait pas de feu dans cette pièce comme dans le parloir : c'était inutile ! A se démener ainsi sous les attaques et dans les parades, on s'échauffait rude, je vous prie de le croire, bien qu'on fût en hiver et que nos vêtements fussent à bas. [...] Je me ramassais, meurtri, mais content. En tombant ainsi, j'apprenais à faire tomber les autres... »

Mais au cours du XIXe siècle se développe la boxe française, combinant techniques de poing de la boxe anglaise et techniques de jambe de la savate et du chausson. En 1899, dans L'Art de la boxe française et de la canne, nouveau traité pratique et théorique, le célèbre Joseph Charlemont détaille tous les « coups, parades et mouvements » de la boxe française – avec une partie dédiée à la boxe anglaise – puis de la canne et du bâton.

Dans sa préface, Charlemont écrit : « La boxe française vient à peine de naître ; elle n'a pas encore un siècle d'existence. Ce n'est que vers 1824 qu'elle fait son apparition ; sous le nom de “la savate”. De son origine, on ne sait pas grand'chose. [...] Les premiers professeurs connus à cette époque étaient : Michel dit Pisseux, Moufflet, Gousset, Charles Lecour, Leboucher et Lozes, mais avant eux ? Qui a été leur maître ? nul ne le sait. Les uns disent que Michel dit Pisseux introduisit le premier les éléments de la savate, en réunissant quelques coups usités dans les barrières de Paris, et en forma une théorie que nous avons du reste entre les mains ; aucun autre document ne peut nous éclairer d'une manière précise sur le véritable auteur de la savate. »

Plus conséquent, La Boxe française historique et biographique, œuvre majeure de Charlemont parue la même année, propose notamment des biographies des maîtres de boxe française et esquisse l’histoire de ce sport de combat, malgré que les « documents sérieux sur la boxe sont fort rares » et que « les anciens maîtres ont malheureusement disparu sans nous faire héritiers des renseignements précieux qu'ils auraient pu nous donner sur le passé ».


À la Belle Époque, la boxe française comme anglaise est très populaire et perçue comme l’aboutissement de la science du combat, ce dont témoigne par exemple La Boxe anglaise et française de Julien Leclerc : « De tout temps on a porté des coups de poing et des coups de pied ; mais les perfectionnements dans l’art de se servir des “armes naturelles” de l’homme et de se comporter en véritable boxeur ne remontent pas à une époque très lointaine. » Mais finalement, au cours du XXe siècle, la boxe anglaise redevient vite la reine des sports de combat, repoussant la boxe française au second plan, même en France.

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